السبت، 28 فبراير 2009



Zahra Boudkour, 23 ans, étudiante, en prison pour engagement étudiant?



Écrit par Fouzia Maqsoud



Zahra Boudkour
Zahra, fleur en arabe, a passé neuf mois en prison sans jugement, dans un pays qui tente de tourner la page des années de plomb. L'ouverture en matière de libertés y est certes indéniable, mais des violations graves des droits humains persistent. Le procès de Zahra et de ses camarades a lieu le 26 février.
Zahra Boudkour est née le 28 novembre 1987 à Zagora au sud du Maroc. Elle est la dernière d'une fratrie de six garçons et de six filles. Zahra a été élevée par sa soeur aînée, après le décès de sa mère le jour de son deuxième anniversaire.
Zahra a grandi dans un milieu modeste, où l'engagement militant était familier. Sa sœur Ghalia et trois de ses frères sont des militants engagés. A l'université, elle poursuivait ses études avec succès, jusqu'à son arrestation le 15 mai 2008.
L'arrestation en guise de négociation :
Zahra préparait sa licence de droit, à l'université de « Cadi Ayyad » à Marrakech. Parallèlement, elle militait avec d'autres étudiants, pour l'amélioration des conditions de l'enseignement dans l'université marocaine. le 14 mai 2008, les étudiants ont organisé une marche en direction de la présidence de l'université, la police a intervenu avec violence pour les disperser.
Le lendemain à 8h30, Zahra et ses camarades se sont rendus à l'université pour engager des discussions avec la présidence.
A 9h05, sa sœur, Ghalia Boudkour a essayé de la joindre sur son téléphone. Zahra n'a pas pu répondre, elle s'est contentée d'appuyer sur les touches de son portable, au moment où elle a entendu un bip. Ghalia Boudkour a entendu le bruit des coups qui s'abattait sur sa petite sœur, les cris... Zahra était dans le fourgon qui l'emmenait au commissariat de Jamaâ Lefna
Torture au commissariat de Jamaâ Lefna
Le commissariat de Jamaâ Lefna, se situe à la place de Jamaâ Lefna, haut lieu du tourisme marocain à Marrakech. Aux sous-sols de ce commissariat, Zahra et ses camarades ont été torturés pendant cinq jours et cinq nuits, privés d'eau et de nourriture, les yeux le plus souvent bandés. Ils ne distinguaient le jour et la nuit que par les bruits provenant de la place. Ceux-ci ont tendance à diminuer la nuit.
Zahra a été menacée de viol, elle a reçu des coups de matraque sur la tête, des coups de pieds, des gifles... Ses tortionnaires n'épargnaient aucune partie de son corps, mais se plaisaient à viser particulièrement la tête, le visage, la poitrine et les genoux. Zahra raconte avoir perdu la vue à de nombreuses reprises à cause des coups reçus sur sa tête.
Le commissariat de Jamaâ Lefna en rappelle un autre de sinistre histoire, celui de Derb Moulay Chrif à Casablanca. Zahra et ses camarades ont subi humiliations, tortures, mauvais traitements... tout comme les opposants passés par Derb Moulay Chrif. Zahra raconte avoir vécu des sévisses semblables à ceux décrits lors des témoignages des victimes des années de plomb au Maroc.
A la prison de Boulemharez l'étudiante présentée comme étant terroriste
A son arrivée à la prison de Boulamharez à Marrakech, Zahra a été déshabillée et abandonnée nue de 5h à 7h30.
En prison, la rumeur laissait croire que Zahra était terroriste. Une manœuvre tentant de lui rendre la vie dure. Peine perdue, Zahra a rapidement gagné la confiance des prisonnières, elle leur a expliqué les raisons de son arrestation, elle a notamment raconté son combat pour que l'université demeure gratuite, accessible aux jeunes issus des familles modestes.
Le 10 juin, Zahra et ses camarades ont entamé une grève de la faim qui a duré quarante six jours, pour dénoncer leurs conditions de détention. Affaiblie, Zahra a perdu connaissance plusieurs fois. Sa sœur Ghalia a précisé qu'elle n'est pas tombée dans le coma comme cela a pu être reporté. Pendant cette grève, Zahra a pu bénéficier de la solidarité des prisonnières de droit commun qui la soutenaient et lui donnaient de l'eau sucrée.
Zahra a aussi bénéficié du réconfort permanent de sa famille. Quand ils lui rendaient visite, la peur au ventre pour sa vie, les membres de sa famille l'encourageaient, et l'assuraient qu'ils comprenaient son combat et le soutenaient.
Dans sa cellule humide et surpeuplée, Zahra jouit du respect et de la confiance de ses co-détenues, elle tente tant bien que mal de préparer ses examens. Récemment, les notes de Zahra et de ses Camarades auraient été falsifiées, probablement pour contrecarrer leur volonté de poursuivre leurs études. Après avoir appris qu'elle a réussi ses modules, Zahra a été informée qu'elle les auraient finalement ratés! En signe de protestation, Zahra et ses camarades ont observé une grève de la faim le 5 et 6 février 2009.
Privée de liberté mais pas de sa voix :
Depuis leur prison, Zahra et ses camarades suivent de près les luttes sociales au Maroc. Le 17 et 18 février dernier, ils ont observé une grève de la faim en solidarité avec les prisonniers politiques de Sidi Ifni. Deux d'entre eux venaient d'être transférés à la prison de Marrakech, pour recevoir des soins dans l'un des hôpitaux de la ville.
C'est également depuis sa prison que Zahra a écrit son allocution à l'occasion de la journée de commémoration du décès de la militante Saïda Mnebhi .
Elle a également fait parvenir un message emprunt de courage et de détermination, au meeting de solidarité avec les luttes sociales au Maghreb organisé à Paris, le 12 février 2009.
Le procès de Zahra et de ses camarades le 26 février : Procès des luttes estudiantines?
En attendant son procès, la santé de Zahra se dégrade, elle souffre de migraines permanentes et de douleurs articulaires sévères, sa vision baisse jour après jour, sans doute à cause des coups reçus sur sa tête, dit sa sœur Ghalia.
Pourtant, Zahra garde un moral d'acier, elle revendique et assume ses engagements et dénonce courageusement ce qu'elle a enduré.
Zahra, fleur en arabe, a passé neuf mois en prison sans jugement, dans un pays qui tente de tourner la page des années de plomb. L'ouverture en matière de libertés y est certes indéniable, mais des violations graves des droits humains persistent. Le procès des détenus politiques de Sidi Ifni prévu le 5 mars, l'intrusion de la police dans l'enceinte de l'université de Fez le 23 février dernier, et les 75 étudiants arrêtés ...
Les autorités marocaines laisseront-elles faner Zahra à son vingt troisième printemps? Le bon sens voudrait que le Maroc soit en cohérence avec ses discours sur l'ouverture démocratique et la fin de l'ère des atteintes aux droits et aux libertés, verdict le 26 février !

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